3e DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE – C
Frère Thomas
Né 8, 2-6.8-10 ; Ps 18 ; 1 Co 12, 12-30 ; Lc 1, 1-4; 4,14-21
24 janvier 2016
Sanctuaire du Saint-Sacrement, Montréal

C’est aujourd’hui que cette parole s’accomplit

Pourquoi Jésus dit-Il que le passage
qu’Il vient de lire se réalise aujourd’hui ? (cf. Lc 4,21)
Voilà un commentaire aussi court qu’étonnant.
De fait, c’est bien là ce que Jésus est en train de faire.
Depuis son Baptême par Jean-Baptiste,
Jésus parcourt la Galilée
en portant la Bonne Nouvelle aux pauvres,
en délivrant des possédés et
en guérissant des malades.
Dans ce qu’Il fait, nous reconnaissons des signes
de la réalisation de la prophétie d’Isaïe,
mais de là à dire qu’en sa Personne ce passage s’accomplit…

Nous savons que les habitants de Nazareth
n’accueillirent pas une telle affirmation de la part de Jésus.
Et nous, comment pouvons-nous accueillir Jésus
dans nos vies, aujourd’hui au 21e siècle ?
Voilà une question intéressante
que nous pouvons loyalement nous poser.

À une époque où nous sommes confrontés
à tant de religions, de croyances, de doutes aussi,
une telle question est pertinente.
Et au cœur de cette semaine
où nous prions pour l’unité des chrétiens,
une telle question nous ramène au cœur de ce qui fait notre foi.

Comment est-ce que je peux accueillir Jésus
dans ma vie aujourd’hui ?
Et cette question en cache en fait une autre :
quelles sont mes attentes dans ma vie ?
Est-ce que la prophétie d’Isaïe
« le Seigneur m’a consacré
pour porter la bonne nouvelle aux pauvres (…),
pour annoncer aux captifs la délivrance (…) »
me parle ? (cf. Lc 4,18)
Est-ce que cette prophétie me concerne,
ou bien est-elle pour d’autres ?

De la même façon, est-ce que je pleure
en entendant la lecture de la Parole de Dieu
– à l’instance du peuple d’Israël
lorsqu’il entendait la lecture de la Loi
par le prêtre Esdras – (cf. Né 8,9)
et que je constate qu’elle n’est pas observée ?

Apporter la Bonne Nouvelle aux pauvres,
annoncer aux captifs la délivrance,
cela peut bien se vivre
dans une perspective non religieuse, humanitaire.
Et nous connaissons tous des personnes
dévouées pour leur prochain afin de faire avancer la justice.
Je me souviens par exemple
de ces jeunes filles dans le métro
qui récoltaient des signatures
en faveur d’une loi contre l’intimidation.
Je leur ai donné la mienne
tout en leur disant que j’étais bien avec elles.

Ne pourrions-nous pas dire
que chaque fois que nous voyons des personnes
vivre dans la justice,
ou se donner pour faire avancer la justice,
la prophétie d’Isaïe s’accomplit ?

Oui, d’une certaine manière…
Alors qu’est-ce que Jésus apporte de plus ?
Jésus nous permet de nous engager pour la justice,
dans la vérité, dans la durée
et sans que nous devions nous appuyer sur nos seules forces.

Est-ce que l’un de nous,
après avoir proclamé un texte qui annonce la justice,
même s’il pratique lui-même cette justice,
dirait à la foule qui l’écoute :
« C’est aujourd’hui que cette parole s’accomplit » ?
On dirait d’une telle personne qu’elle est bien prétentieuse,
qu’elle est folle même
et que sa parole est pour le moins déplacée.

Si nous regardons la scène
décrite dans le livre de Néhémie :
lorsque le scribe Esdras
ouvre le livre de la Loi de Moïse pour le lire,
toute l’assemblée se met debout,
puis ils s’inclinent et se prosternent.
C’est là une liturgie que le peuple d’Israël retrouve
parce que la Loi n’est pas n’importe quel livre.
C’est la Torah révélée par Dieu par l’entremise de Moïse
et tout le peuple pleure, en découvrant le décalage
entre ce que prescrit la Loi et leur vie.

Jésus, en déclarant que la Première Alliance
est accomplie en sa Personne,
vient définitivement changer les larmes du peuple en joie.
Jésus nous redit la même chose chaque fois
que nous nous rassemblons pour prier en son nom
et spécialement quand nous célébrons la messe le dimanche.
Quelle chance, quelle grâce est la nôtre !
Quand nous venons à la messe,
ou bien aux Laudes ou aux Vêpres,
nous entendons Jésus nous redire :
« la Bonne nouvelle est annoncée aux pauvres,
les prisonniers sont libérés,
une année de grâce est proclamée ! »

Si nous accueillons cela,
alors nous repartons de la messe avec la joie
comme le peuple d’Israël du temps de Néhémie
et la joie du Seigneur est notre rempart (Ps 18(19).

Comme les habitants de Nazareth,
nous pouvons nous demander
comment un homme, Jésus,
peut affirmer qu’en Lui l’Écriture est accomplie.
Cela prend un saut dans la foi.
Et ce n’est pas dénué de bon sens,
car Jésus, en sa mort et sa résurrection,
a aussi vécu ces paroles du prophète Isaïe.
Jésus est toujours resté un homme équilibré,
même lorsqu’Il a prononcé des paroles
qui peuvent nous paraître folles.

En cette semaine de prière pour l’Unité des chrétiens,
laissons Jésus nous redire qu’en sa Personne humano-divine,
Il a accompli cette unité.
Laissons Jésus nous donner sa joie
qui est notre rempart.
Cela nous donnera davantage
de force et de persévérance
pour nous engager pour la justice, pour l’unité,
chacun, chacune avec le charisme,
avec les talents qui sont les siens.

© FMJ – Tous droits réservés.