FMJ Mtl5e DIMANCHE DE CARÊME – A
Frère Antoine-Emmanuel
Éz 37, 12-14 ; Ps 129 ; Rm 8, 8-11 ; Jn 11, 1-45
2 avril 2017
Maison de Prière, Mont Saint-Hilaire

« Crois-tu cela ? »

Il y a dans la Lettre aux Hébreux un passage
où l’auteur affirme que la Parole de Dieu
est plus tranchante qu’aucun glaive à deux tranchants.
Elle pénètre jusqu’au point de division de l’âme et de l’esprit (Hé 4,12).
La Parole de Dieu pénètre et elle tranche, sépare.
Elle révèle le profond du cœur ;
devant elle, nous sommes à nu.

Voilà bien ce qu’opère l’Évangile que nous venons d’entendre.
Une page, un évènement si tranchant
que seul Jean le racontera dans son Évangile.

Car le miracle est si grand, si bouleversant,
pour ne pas dire déstabilisant.

Lazare est au tombeau.
La mort a fait son œuvre, une œuvre irréversible
maintenant que quatre jours sont passés.
Le corps est bel et bien séparé de l’âme.
L’âme de Lazare est dans le sein d’Abraham.
Son corps est au tombeau et il sent déjà,
c’est-à-dire que la putréfaction du corps est bien commencée.
D’autant plus que Lazare n’est pas mort d’un accident,
mais d’une maladie grave.

Tout le drame de la mort est ici présent :
la séparation dramatique de l’âme et du corps,
la décomposition du corps qui pourtant,
portait l’image de Dieu.

Le tombeau est fermé.
La pierre est roulée et tout est bel et bien fini.
C’est l’heure du deuil et des larmes.

Un deuil violent pour Marthe et Marie
parce que Jésus, averti, n’est pas venu.

Un deuil qui fait l’affaire des opposants à Jésus
parce qu’il démontre que Jésus, non seulement
est impuissant en face d’une maladie grave,
mais aussi qu’Il trahit une amitié profonde.

C’est avec ce contexte dans notre cœur
qu’il nous faut alors contempler
ce qui se passe au tombeau de Lazare.

« Enlevez cette pierre ! » (Jn 11,39)
On n’enlève pas la pierre d’un tombeau !
D’autant plus que la loi stigmatise
le fait de toucher un cadavre.
C’est l’impureté par excellence !

Mais l’autorité est telle dans la Parole de Jésus
que l’on ôte la pierre.
On imagine une lourde pierre qu’on roule péniblement,
et peu à peu apparaît l’obscurité du tombeau,
et l’odeur, l’odeur infecte de la mort, de la putréfaction.

Tout est noir, tout est infect…
Mais Jésus est là…
C’est un combat… un duel…
entre Jésus et la mort,
devant Marthe et Marie et leurs proches,
devant les nombreux juifs venus pour observer
ce qu’allait faire Jésus.

Jésus commence par prier à haute voix :
« Père, Je te rends grâce de ce que Tu M’as exaucé » (Jn 11,41)
Jésus bénit le Père de pouvoir accomplir un signe immense
qui va révéler la vérité des cœurs.

Alors Jésus crie d’une voix forte dit l’Évangéliste (v. 43).
La voix de Jésus se fait entendre
dans la profondeur lugubre et infecte de la mort.
« L’heure vient où tous ceux qui gisent dans les tombeaux
entendront Sa Voix,
et ceux qui auront fait le bien en sortiront
pour la Résurrection qui mène à la Vie ;
ceux qui auront commis le mal
pour la Résurrection qui mène au jugement » (Jn 5, 28-29).

Ces mots prononcés par Jésus après la guérison du paralytique
s’accomplissent maintenant avec un réalisme bouleversant.

Il faut contempler dans notre prière
une forme, un cadavre tout enveloppé
qui sort miraculeusement,
qui se déplace alors que ses pieds sont liés
et son visage couvert…

La Parole de Jésus est allée délivrer Lazare de la mort.
Son âme s’est à nouveau jointe à son corps.
Et le corps en décomposition a retrouvé sa santé.
Lazare peut marcher puisque Jésus dit :
« Déliez-le et laissez-le aller » (Jn 11,44).
Lazare est en santé puisqu’on fera sans tarder
un banquet en son honneur.

Lazare est bel et bien ressuscité,
et c’est tellement vrai que les ennemis de Jésus
voudront mettre à mort Lazare
qui est devenu un témoin éclatant
de la puissance divine de Jésus.

*

Le signe est immense
et il nous est offert aujourd’hui.

C’est vrai, nous pouvons le refuser.
Nous pouvons le considérer comme une légende.
Nous pouvons en faire une œuvre littéraire
dont on enlève les couches l’une après l’autre
pour ne pas avoir à croire… ou à ne pas croire…

Mais nous pouvons aussi croire,
ou tout au moins, vouloir croire.
Croire que Jésus, qui apparaît si humain avec ses larmes,
est vraiment Dieu.
Croire qu’Il EST la Résurrection et la Vie.
Croire qu’Il accomplit ce qu’Ézéchiel a vu
quand une multitude d’ossements ont repris vie
par la Parole de Dieu, par l’Esprit de Dieu.

Et croire… et entendre Jésus nous dire
« Je te dis que si tu crois, tu verras la gloire de Dieu » (v. 40).

Croire en la Résurrection, c’est un bouleversement
de notre manière de penser et de vivre.
Croire en la Résurrection, c’est reconnaître
que notre vie ici-bas est beaucoup plus précieuse
que nous le pensions :
elle est le lieu où se joue notre destinée éternelle,
le lieu où nous pouvons œuvrer
à la béatitude éternelle des autres.

Tout change
quand la foi en la Résurrection s’allume en nous,
quand nous reconnaissons en Jésus
Celui qui EST la Résurrection.

La Résurrection n’est pas loin de nous :
elle nous habite.
Elle est en nous et au milieu de nous
puisque Jésus est en nous et au milieu de nous.

Aucune situation de ténèbres,
aucune situation de putréfaction, de décomposition, de mort
n’a le dernier mot lorsque nous enlevons la pierre,
lorsque nous laissons la Parole de Jésus y pénétrer.

Et cela va loin, très loin :
« Si l’Esprit de Celui qui a ressuscité Jésus d’entre les morts
habite en vous,
Celui qui a ressuscité Jésus d’entre les morts
donnera aussi la vie à vos corps mortels
par son Esprit qui habite en vous » (Rm 8,11).

Quelle merveille !
À nous de laisser la Résurrection agir en nous et entre nous,
et dans le monde.
Comment ? Par notre foi.
Car « celui qui croit en Moi, même s’il meurt, vivra
et quiconque vit et croit en Moi, ne mourra jamais » (Jn 11, 25-26).
E Jésus questionne Marthe : « Crois-tu cela ? »
Seigneur nous croyons et nous voulons croire davantage
pour être en ce monde des témoins de la Résurrection :
des hommes et des femmes qui collaborent avec Toi
à ton règne d’Amour, de Vie et de Lumière.

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