FMJ MtlVendredi, 8e Semaine du Temps ordinaire – A
Frère Antoine-Emmanuel
Si 44, 1.9-13 ; Ps 149 ; Mc 11, 11-25
4 mars 2011
Sanctuaire du Saint-Sacrement, Montréal

La foi de Dieu

J’ai peur.
J’ai peur de prêcher sur ces paroles de Jésus :
« Tout ce que, priant, vous demandez,
croyez que vous l’avez déjà reçu
et cela sera, pour vous » (Mc 11,24).

J’ai peur,
j’ai peur de diluer par mes mots
la radicalité, la vérité, la force des paroles du Fils de Dieu,
du Verbe de Dieu fait chair,
comme on dilue un vin fort
qui perd sa saveur.

Le risque est toujours là
de ramener la Parole au niveau de notre foi hésitante,
plutôt que de permettre à la Parole
de provoquer notre foi
et donc de l’affermir.

Les paroles de Jésus sont bien celles-ci :
« tout ce que, priant, vous demandez,
croyez que vous l’avez déjà reçu
et cela sera, pour vous ».
Voilà ce qui est vrai, ce qui est sûr,
plus sûr que nos impressions et nos convictions.

Et combien de croyants en témoignent.
Il suffit de penser à Pierre qui fixe des yeux
l’impotent de la belle porte
et, sans hésiter dans son cœur, lui dit :
« De l’argent de l’or, je n’en ai pas,
mais ce que j’ai je te le donne :
au nom de Jésus Christ le Nazaréen, marche !
Et le saisissant par la main droite, il le releva.
À l’instant ses pieds et ses chevilles s’affermirent ;
d’un bond il fut debout, et le voilà qui marchait (Ac 3,6-7).
Cela, parce que Pierre n’a pas hésité en son cœur.
Il avait ce que Jésus appelle dans l’Évangile d’aujourd’hui
la foi de Dieu (πιστιν Θεου) (Mc 11,22).
Une foi aussi claire et limpide qu’un ciel dégagé en hiver
quelque part au-delà du Lac St-Jean.

Pensez aussi à Paul qui proclame au magicien
et faux prophète Elymas :
«Voici à présent que la main du Seigneur est sur toi
Tu vas devenir aveugle,
et pour un temps, tu ne verras plus le soleil » (Ac 13,11).
Et parce que Paul avait cette même foi de Dieu,
cette foi que donne Dieu,
« alors à l’instant même, obscurité et ténèbres
s’abattirent sur Élymas,
et il tournait de tous côtés,
cherchant quelqu’un pour le conduire » (Id. ).

Et après Pierre et Paul,
combien de femmes et d’hommes depuis 2000 ans
ont témoigné de cette foi qui n’hésite pas,
qui ne « balance pas » comme traduit sœur Jeanne d’Arc.
Il suffit de penser à Émilio Tardif qui a prêché ici même !

*

Prenons un exemple bien concret :
nous voulons tous devenir des saints,
c’est-à-dire vivre selon Dieu,
avoir le style de vie de Dieu que la Bible appelle la sagesse.
Écoutez ce que nous dit Saint Jacques :
« Si l’un de vous manque de sagesse,
qu’il la demande à Dieu
– il donne à tous généreusement et sans récriminer –
et elle lui sera donnée ».
Et Jacques précise :
« Mais qu’il demande avec foi, sans hésitation,
car celui qui hésite ressemble au flot de la mer
que le vent soulève et agite.
Qu’il ne s’imagine pas, cet homme-là,
recevoir quoique ce soit du Seigneur ;
homme à l’âme partagée,
inconstant dans toutes ses voies » (Jc 1,5-8).

Frères et sœurs,
est-ce que nous ne cultivons pas en nous cette âme partagée,
littéralement une « double âme » ?
Une âme qui croit
et une âme qui discute…

Pourquoi est-ce que nous nous privons
de la vie et de la joie contagieuses
qui viennent de la foi de Dieu ?

Comme le flot de la mer,
nous nous laissons soulever et agiter
par toutes sortes de discours intérieurs
qui en réalité disent tous une même et unique chose :
j’ai peur de livrer ma vie à Dieu.
Je préfère ma foi à la foi de Dieu.

Combien d’hommes et de femmes nous privons de Dieu
par ce mécanisme que le diable entretient habilement !

Ce soir nous pouvons ouvrir notre cœur
et, en cette Eucharistie,
laisser venir en nous la foi que Dieu veut nous donner ;
la foi de Dieu.

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