FMJ MtlMercredi, 4e Semaine de Carême – C
St Patrick, évêque, apôtre de l’Irlande, † 464
Frère Antoine-Emmanuel
Is 49, 8-15 ; Ps 144 ; Jn 5, 31-47
17 mars 2010
Sanctuaire du Saint-Sacrement, Montréal

Je t’ai gravé sur les paumes de mes mains

Le Carême est un moment qui peut être rude,
parfois très rude.
Avec le jeûne, la prière, le partage,
nous descendons dans notre précarité,
nous trouvons ou retrouvons notre fragilité.

Pour reprendre le contexte de la première Lecture,
nous faisons l’expérience de l’exil.
Nous prenons conscience de ce que notre péché
nous a exilés hors de l’amour.

Et peut-être en sommes-nous venus à gémir :
Le Seigneur m’a abandonné,
le Seigneur m’a oublié (Is 49,14).
Nous nous sentons délaissés par Dieu, sinon rejetés.

[Ton] amour, Seigneur, est-il épuisé jusqu’à la fin ?
Est-ce que Dieu oublie d’avoir pitié
ou de colère ferme-t-il ses entrailles ? (Ps 76(77), 9-10)

Quand on a goûté l’amitié avec Dieu,
le sentiment de son absence est douloureux, très douloureux.

Mais voici qu’aujourd’hui,
le Seigneur nous annonce qu’un chemin s’ouvre
qui nous ramènera de l’exil vers la communion.
Un chemin où le Seigneur veillera merveilleusement sur nous.
La nourriture n’y manquera pas ;
le soleil et le vent brûlant ne nous frapperont plus ;
les montagnes seront rabaissées.
Et le Seigneur nous mènera
vers des eaux jaillissantes (cf. Is 49, 10).

Un chemin s’ouvre !
Et pourquoi le Seigneur nous ramènera-t-il vers Lui
avec autant de tendresse ?
Parce qu’Il ne peut nous oublier (cf. v. 15).
Il a gravé ton nom,
ou plus exactement, Il t’a gravé
sur les paumes de ses mains (cf. v. 16).

Tu es gravé sur les mains de Dieu.
Ton visage, ton cœur, ta vie, ton éternité :
tout est gravé en Dieu.
Tu es ineffaçablement gravé dans le cœur de l’Éternel.

N’est-ce pas cela que nous avons vu de nos yeux hier
en voyant le paralytique guérir,
prendre son grabat et quitter la piscine de Bethesda
et entrer dans le Temple
qui lui était interdit depuis 38 ans (cf. Jn 5, 9, 14) ?

L’Amour s’est penché sur lui
et l’a rendu entièrement sain (cf. Jn 7, 23).

Son exil a pris fin dans la rencontre de Jésus.
Cet homme était comme mort,
mais il a entendu la voix du Fils de Dieu
et il s’est relevé.

Que s’est-il passé ?
Jésus qui ne cesse de contempler le Père
qui Lui donne vie
a de la même manière donné vie à cet homme.

Le Père travaille :
Il donne vie, Il engendre le Fils
dans un éclat de joie.
Et le Fils travaille :
Il rend grâce, Il se donne au Père
et Il se donne à nous
dans le même éclat de joie.

Et ce soir nous nous laissons recueillir par cet amour,
nous nous laissons relever par cette voix qui nous rejoint
au plus noir de nos exils et de nos paralysies.

Ce qui est magnifique, c’est que les morts et les résurrections,
les Pâques successives, de notre vie ici-bas
nous annoncent la Pâques ultime de notre vie.
Une heure vient
où tous ceux des sépulcres entendront sa voix (du Fils)
et sortiront,
ceux qui ont fait le bien pour une résurrection de vie,
et ceux qui ont commis le mal
pour une résurrection de jugement (Jn 5,28-29).

Le Seigneur nous a gravés si profondément en Lui
qu’Il nous veut avec Lui pour l’éternité,
qu’Il veut le monde entier avec Lui pour l’éternité.
Car Dieu veut que tous les humains soient sauvés (1 Tm 2,4).
Nos petites Pâques de cette vie élargissent notre cœur
et allument en nous la passion des âmes,
le désir que tous soient sauvés,
qu’aucun ne se perde.

Chacun des visages
que nous avons croisé aujourd’hui dans la rue
est l’objet de la passion de Dieu
et peu à peu doit devenir l’objet de notre passion.

Ce soir, laissons-nous attirer par le Seigneur dans sa passion.
Il nous partage le feu de son cœur,
son amour pour le monde ;
cet amour qui brûle de tous ses feux dans l’Eucharistie.

L’Eucharistie est un grand Sabbat de nos œuvres et de nos mérites
où le Père travaille,
où le Fils travaille,
pour que la Vie éternelle nous saisisse
et saisisse tout homme, toute femme du monde entier.

Non, Dieu n’a pas fermé ses entrailles.
Il les ouvre pour le monde entier !
Et si nous avons le monde entier dans notre cœur,
nous y entrerons,
mieux, nous y entrons ce soir.

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