FMJ Mtl4e DIMANCHE DE PÂQUES – B
Frère Thomas
Ac 4, 8-12 ; Ps 117 ; 1 Jn 3, 1-2 ; Jn 10, 11-18
26 avril 2015
Sanctuaire du Saint-Sacrement, Montréal

À la suite de Jésus Bon Pasteur, donner notre vie pour toutes nos brebis

Étant des citadins, nous ne sommes sans doute pas familiers
avec la figure d’un pasteur ou d’un berger.
Personnellement, je n’ai pas souvent eu l’occasion d’en voir.
Mais nous pouvons facilement
nous représenter un berger
qui veille sur ses brebis,
qui les mène en des lieux où l’herbe est la meilleure possible,
qui fait attention pour qu’elles ne s’égarent pas,
ne se blessent pas et qui leur parle avec sollicitude.

Une personne un jour me racontait
comment il avait observé un berger au Portugal
qui appelait chacune de ses brebis par son nom,
affectueusement, comme dans l’Évangile.
Ainsi, un pasteur, un berger, prend d’abord soin de ses brebis.

Jésus se déclare aujourd’hui bon pasteur, vrai berger.
Lorsque nous voyons Jésus agir dans les récits des Évangiles,
nous nous représentons bien cela.
Jésus est plein de sollicitude envers la santé
(physique, psychique et spirituelle) de tous.
Il va jusqu’à Se préoccuper de nourrir matériellement
les foules qu’il enseigne.

Comment Jésus est-il pasteur pour nous aujourd’hui ?
Pour certains d’entre nous, c’est évident
et beaucoup pourraient témoigner
comment Jésus prend soin d’eux de bien des manières.
Pour d’autres, cela est moins évident.
Mais ce qui est certain pour tous,
c’est que la figure de Jésus bon pasteur,
en qui nous avons mis notre foi,
nous stimule à être pasteurs les uns pour les autres.

Ainsi notre foi en Jésus fait partie de nos valeurs
qui nous poussent à nous engager au service de nos semblables.
Beaucoup de gens sur cette terre ont des valeurs
qui les poussent à se mettre au service des autres,
dans l’amour désintéressé.
Nous pouvons par exemple considérer
tous ces bénévoles dans notre pays,
qui sont nombreux à s’engager gratuitement
et généreusement pour les autres
et pas forcément en raison de convictions religieuses.

Sommes-nous conscient de la beauté de nos engagements
– même petits – pour les autres ?
Sommes-nous conscients
de toutes les belles valeurs qui nous habitent ?
Cependant, quand nous regardons Jésus bon pasteur,
il y a deux caractéristiques qui lui sont spécifiques
dans ses engagements pour ses brebis :
Il donne sa vie pour ses brebis.
Il a aussi d’autres brebis qui ne sont pas de cette bergerie.

Il donne sa vie pour ses brebis.
L’image que Jésus donne est éloquente.
« Le berger mercenaire, s’il voit venir le loup,
il abandonne les brebis et s’enfuit » (cf. Jn 10,12).
Quoi de plus naturel – pourrions-nous penser –
s’il se sent impuissant devant le danger que représente le loup,
va-t-il risquer sa vie en restant avec le troupeau ?
Eh bien, Dieu ne pense pas ainsi.
Et lorsque Dieu Se fait homme en Jésus Christ,
Il n’hésite pas à risquer sa vie pour rester avec ses brebis
et accepte même de perdre sa vie sur la croix.

Toute la Bible nous parle de la fidélité de Dieu,
qui reste auprès de son peuple,
malgré les dangers et les infidélités de ce dernier.
Le Seigneur est mon berger – dit le psaume 22 –
je ne manque de rien.
(…) Passerais-je un ravin de ténèbres,
je ne crains aucun mal car tu es près de moi.

Tel un berger, Il fait paître son troupeau
– dit le prophète Isaïe – de son bras il rassemble les agneaux ;
Comme un pasteur s’occupe de son troupeau
– annonce le prophète Ézéchiel –
je m’occuperai de mes brebis.
Je les retirerai de tous les lieux où elles furent dispersées.
Dieu est fidèle.
Et si Jésus passe par la mort, en raison de sa fidélité,
Il ne la subit pas.
Il la vit par décision.
« Personne n’a pu enlever ma vie – dit Jésus – :
je la donne de Moi-même.
J’ai le pouvoir de la donner et le pouvoir de la reprendre » (Jn 10,18).
Et dans sa résurrection,
Jésus retrouve encore plus belle la vie qu’Il avait donnée.

Il est bien des manières pour nous, humains,
de donner notre vie pour les brebis qui nous sont confiées.
Et nous le vivons déjà, et nous faisons l’expérience
que lorsque nous donnons de notre vie
pour que d’autres vivent,
cela nous rend profondément heureux.
Je vois tel de mes confrères de communauté
qui achète des épices que lui n’aime pas particulièrement,
mais que certains de ses frères aiment.
Il se fait bon pasteur pour ses frères.

Je vois telle de mes consœurs
qui passe du temps à écouter
une dame qui se confie à elle dans l’église.
Elle se fait bon pasteur pour cette personne.
Je vois ces parents qui veillent sur tous leurs enfants
durant la messe, attentifs aux besoins de chacun.
Ils se font bon pasteur pour leurs enfants.

Il est cependant un état de vie dans l’Église
qui fait peur aujourd’hui.
C’est la vie consacrée dans la vie religieuse ou dans le sacerdoce.
Beaucoup de jeunes sont réticents à s’y engager.
Pourtant cette vie est une configuration toute spéciale
– et durable – au Bon Pasteur qui donne sa vie pour ses brebis.

Si j’expérimente combien donner de sa vie ponctuellement
par amour pour d’autres me rend heureux,
combien plus si je donne ma vie durablement, totalement,
cela me rendra heureux.

Beaucoup acceptent de travailler pour des entreprises
qui les exploitent, en vue de gagner de l’argent.
Combien ils seraient davantage heureux
s’ils se laissaient embaucher par le Christ Lui-même.
Si le Christ est exigeant, Il reste le Bon Berger
qui prend soin de ceux et celles qui travaillent pour Lui.
Le Christ n’exploite personne
et Il ne met personne au chômage.
Et vous, jeunes et jeunes adultes qui percevez en vous l’appel
à vous consacrer au Seigneur,
persévérez dans votre recherche
pour réaliser votre désir si grand
et si légitime de bonheur véritable.
Ne vous laissez arrêter ni par vos faiblesses humaines,
ni par le manque de soutien de votre entourage,
ni par les déceptions que vous pouvez rencontrer
dans les communautés religieuses ou séminaires actuels.

Et vous qui ne vous sentez pas appelés à la vie consacrée,
et nous qui sommes dans la vie consacrée depuis des années,
soutenez, soutenons ceux et celles
qui veulent s’orienter vers cette vie.

La vie consacrée
– et nous sommes dans l’année de la vie consacrée –
est une présence visible sur cette terre
de Jésus Bon Pasteur qui donne sa Vie pour ses brebis.
Elle est irremplaçable sur cette terre.

Et le pape François
– pour cette journée de prière pour les vocations –
appelle les jeunes à sortir d’eux-mêmes
pour accueillir en eux l’appel du Christ à se consacrer à lui.
Jésus Bon Pasteur a aussi d’autres brebis
qui ne sont pas de cette bergerie :
et celles-là aussi, il faut qu’Il les conduise.
Être Bon Pasteur à la manière de Jésus,
c’est aussi être ouvert à toute l’humanité.

Considérons par exemple comment Jésus s’ouvre,
dans sa vie publique,
à des brebis qui ne sont pas de la maison d’Israël :
le centurion dont il guérit l’enfant ;
la femme de Samarie ;
la femme Syro-phénicienne ;
Ponce Pilate même, avec qui Il ne refuse pas d’échanger.

Si je ne prends soin que des brebis de ma famille,
de ma communauté, de ma culture, de ma nation,
de ma race, de mon ethnie, de ma religion
et si je n’ai que des regards méprisants envers les autres,
est-ce que je ressemble à Jésus Bon Pasteur ?

Si je puis me tenir aujourd’hui
dans cette Eucharistie dominicale,
c’est qu’un jour des personnes
m’ont fait découvrir Jésus Bon Pasteur,
et que je suis devenu une de ses brebis,
avec toutes mes caractéristiques humaines ;
langue, nation, culture, race…
et avec tous les traits de mon caractère,
avec l’histoire qui est la mienne.
Là encore le pape François nous appelle
à sortir de nos églises, de nos sécurités
– comme l’ont fait les apôtres –
pour aller à la rencontre de toutes ces brebis
qui ne sont pas de notre enclos,
mais que Jésus se plait à conduire.

Et la vie consacrée est le lien par excellence
où cette ouverture à l’universel se vit.
Car dans une communauté, on ne se choisit pas,
et on ne peut pas rester dans notre famille
culturelle, linguistique ou sociale.
Personnellement, depuis que je suis dans la vie religieuse,
je ne cesse de vivre l’internationalité, l’interculturalité, et l’interreligieux.

Là encore, quelle perspective passionnante
pour un jeune qui veut consacrer sa vie
à la suite du Christ Bon Pasteur !

© FMJ – Tous droits réservés.