FMJ MtlMercredi, 24e Semaine du Temps ordinaire – A
Frère Antoine-Emmanuel
1 Co 12,31 – 13,13 ; Ps 32 ; Lc 7, 31-35
17 septembre 2014
Sanctuaire du Saint-Sacrement, Montréal

Est-ce que tu pleures ? Est-ce que tu danses ?

L’Évangile de ce jour nous appelle à un nouveau bilan de santé :
le membre du corps du Christ que je suis est-il en santé,
ou bien est-il malade ?
Est-il en train d’épuiser les autres membres du corps ?

La question du médecin Jésus est aujourd’hui :
Est-ce que tu pleures ?
Est-ce que tu danses ?

Est-ce qu’il t’arrive de pleurer intérieurement
ton péché, ton ingratitude devant Dieu ?
Une âme chrétienne en santé
est une âme qui connaît les larmes.
Ce sont ces moments où nous percevons
notre misère profonde devant Dieu.
« Seigneur, prends pitié. »
« Seigneur, je ne suis pas digne de te recevoir… »
Comment est-ce possible que je sois si ingrat
devant tant d’amour ?
Seigneur, vois le mal qui habite mon cœur…
Je suis si infidèle, si rebelle, si froid
devant Toi comme devant les autres.
Je suis si insensible devant la souffrance des autres.
Et notre âme en pleure.
Elle ne veut pas se justifier ;
elle ne veut pas de circonstances atténuantes pour se disculper.
Elle veut pleurer sur le cœur de Dieu
percevant que ses larmes sont saines,
qu’elles purifient et lavent notre être profond.
Ce sont des larmes très douloureuses pour l’âme,
mais elles sont en même temps
comme une pluie qui féconde la terre.

Est-ce que tu pleures ?

Et : est-ce que tu danses ?
Est-ce que ton âme danse de joie ?
Connais-tu ces moments où l’émerveillement te saisit,
où l’Amour de Dieu est trop grand, trop beau, trop fou,
et qu’aucun mot ne peut le décrire ?

Tout ce qui est de toi, s’efface :
il n’y a plus que Dieu et sa tendresse.
Il n’y a plus que les autres que tu désires aimer et servir.
Parce que ton âme a goûté ce qu’est le salut :
ce sauvetage amoureux
où la Miséricorde divine te recueille
et te recrée.
L’âme sort d’elle-même à la rencontre de Dieu et des autres.
Elle voudrait danser, jouer, chanter.
À cause de Dieu.
À cause des Trois.
À cause de l’Amour.

Est-ce qu’il arrive à ton âme de danser ?

*

Combien fut grande la douleur de Jésus
de voir parmi ses contemporains des hommes très religieux,
incapables de pleurer et de danser.
Des hommes qui employaient leur intelligence
pour justifier l’insensibilité de leur âme
devenue aussi rigide que la pierre.
Ils classaient Jean parmi les possédés
et Jésus parmi les gloutons et les ivrognes.
Et ces jugements qui semblaient bien sages
n’étaient que l’habillement
qui cachait le refus de Dieu et de son Amour.

Les enfants de la Sagesse, eux,
reconnaissent ce qui vient de Dieu.
Les enfants de la Sagesse divine,
ceux qui laissent l’Esprit les enseigner,
savent pleurer et savent danser.

Et le premier disciple de la Sagesse divine
est Jésus Lui-même.
Jésus qui a pleuré devant Jérusalem.
Jésus qui a exulté de joie devant le Père,
proclamant ses louanges.
Et sans doute avec son corps pour exprimer
le débordement de sa joie comme le peuple d’Israël
sait si bien le faire.

Et toi, et moi ?

Nous pourrions demander ce soir au Seigneur
la grâce de pleurer nos impatiences,
nos refus de rendre service,
nos jalousies,
nos vanteries et notre orgueil ;
nos malhonnêtetés, nos égoïsmes et nos rancunes,
notre satisfaction du malheur des autres,
nos attachements aux mensonges…

Seigneur, donne-nous de pleurer notre si misérable amour
qui nous a fait te mettre en croix.

Mais donne-nous aussi de jubiler, de chanter, de danser
devant ta divine patience,
devant ta tendresse qui se met à notre service ;
devant ton cœur qui ne connaît ni jalousie,
ni vantardise, ni orgueil ;
devant ta vérité, ta bonté et ta miséricorde,
Toi qui trouves ta joie dans la vérité de notre amour
et qui jamais, jamais,
ne te réjouis de nos errances et de nos chutes.
Donnes-nous danser devant ton amour qui supporte tout,
qui fait confiance en tout,
qui espère tout,
qui endure tout.
Devant ton amour qui resplendit sur la croix
qui triomphe de tous nos péchés par ta résurrection
et qui se répand en nous par la continuelle Pentecôte de l’Église.

Seigneur, fais-nous pleurer de joie,
fais-nous danser pour l’éternité.
Amen.

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