FMJ MtlVendredi, 2e Semaine du Temps ordinaire – B
Frère Antoine-Emmanuel
1 S 24, 3-21 ; Ps 56 ; Mc 3, 13-19
20 janvier 2012
Sanctuaire du Saint-Sacrement, Montréal

Ceux qu’Il voulait

« Jésus monte sur la montagne
et Il appelle à Lui ceux qu’Il voulait » (Mc 3, 13).
Il y a là un acte d’autorité extraordinaire
de Jésus qui bâtit son Église.
Et cela au terme d’une nuit de prière
où il a vu et accueilli le dessein du Père.

Il appelle à Lui ceux qu’Il voulait
et, nous dit Saint Marc, ils s’en vont vers Lui (id.) :
on voit l’un après l’autre douze hommes
sortir des rangs de la foule et se laisser lier à Jésus.

Et Marc ajoute : et (Jésus) en fait Douze (v. 14).
Jésus les fait, les crée, les conçoit.
Jésus crée ce collège.

Jésus aurait pu choisir des femmes
avec toutes leurs richesses
de sensibilité, d’intuition,
d’ouverture, d’accueil, de maturité, de beauté.
Il choisit pourtant douze hommes,
pour être signes de la paternité de Dieu
comme Lui en est l’image parfaite.
Il les choisit pour laisser passer quelque chose
qui est tellement plus grand qu’eux.

Jésus aurait pu choisir
les docteurs de la loi brillants et ouverts,
des pharisiens saints et exemplaires,
des prêtres de grande piété,
ou bien d’excellents organisateurs,
de fins intellectuels, de grands chercheurs.
Non…Il choisit des hommes simples,
des hommes courageux
comme l’étaient les pêcheurs du lac,
des hommes très proches du réel, des travailleurs.
Bref, des hommes d’incarnation
et des hommes qui ne se laisseront pas trop séduire
par leurs propres talents.

Et pour quelle mission les choisit-il ?
Est-ce pour être avec Jésus
dans un compagnonnage quotidien, une proximité ?
Ou bien est-ce pour les envoyer,
pour qu’ils aillent œuvrer en son nom ?
Ce n’est pas l’un ou l’autre,
mais l’un et l’autre :
être avec Jésus et être envoyés !
Parce qu’être avec Jésus,
c’est partager son envoi missionnaire.
Et être envoyé en son nom n’a de sens
qu’en demeurant solidement enracinés en Lui.

Et que feront-ils concrètement ces douze hommes
dont Saint Luc dit que Jésus
les a élus pour Lui ? (cf. v. 14)
– c’est le sens de la forme du verbe
utilisé par Saint Luc en Luc 6,13 –
ils iront prêcher :
ils iront annoncer l’Évangile de Jésus.
Et cela avec le pouvoir d’expulser les démons :
la puissance même de Jésus,
la victoire de Jésus
va s’accomplir à travers eux.

L’Évangile nous dira aussi
que leur mission est de donner fidèlement
le blé de Jésus dans l’attente de son retour glorieux.

Au temps de la Passion Jésus dira à Pierre
qu’il aura à affermir ses frères dans la foi.

Et au temps de la Résurrection,
Jésus sera plus explicite encore :
Pierre a pour mission de paître le troupeau.

Paître, c’est prendre soin du troupeau ;
c’est veiller à ce que chaque brebis
ait ce qu’il faut pour être en santé,
c’est guider, encourager, corriger, exhorter.
C’est faire sienne la mission de Jésus Bon Pasteur
qui donne sa vie pour ses brebis.
Ou, mieux, c’est laisser Jésus exercer en soi
ce ministère de bon pasteur.
La mission de Pierre et des Douze,
c’est tout cela.
C’est être, dans leur humanité fragile et maladive,
des sacrements de Jésus.
C’est tout cela,
mais ce n’est pas exercer un pouvoir sur les autres.

Le Pape Jean-Paul II l’a dit en ces termes
dans sa Lettre encyclique « Ut unum sint » :
« Les évêques – successeurs des apôtres –
ont reçu de l’Esprit la charge
non pas d’exercer un pouvoir sur le peuple
– comme le font les chefs des nations et les grands –
mais de conduire le peuple
pour qu’il puisse avancer vers de paisibles pâturages » (n° 94).

Voilà ce qui s’est passé ce matin-là
sur la montagne en Galilée.
Jésus n’a pas investi douze hommes
d’un pouvoir à exercer sur les autres;
il a appelé douze hommes à être avec Lui pasteurs.
pasteurs avec Lui ;
pasteurs en son nom.
pasteurs qui doivent sans cesse renoncer
à exercer un pouvoir sur les autres
pour être instruments du pouvoir de Jésus
sur le péché, sur les esprits mauvais, sur la mort.

Et si les douze sont pasteurs,
et si les évêques et les prêtres sont pasteurs,
l’unité du troupeau est nécessairement
une tâche essentielle de leur responsabilité.

Si un pasteur cherche le pouvoir,
s’il paît le troupeau pour soi,
le troupeau se divise.
Si un pasteur se laisse à l’Esprit
et se rend instrument de la puissance de Jésus sur le mal,
il pourra servir l’unité.

Prier pour l’unité cette semaine,
c’est donc particulièrement prier pour les pasteurs
de toutes les Églises et les communautés ecclésiales.

Voilà qui nous convie ce soir à prier
pour les pasteurs protestants
qu’ils soient luthériens, calvinistes,
méthodistes, baptistes, évangéliques…
à prier pour le clergé orthodoxe
et particulièrement pour les patriarches
de Constantinople, de Moscou, d’Athènes ;
à prier pour l’évêque de Rome,
les évêques et les prêtres catholiques.

Père,
que nous ne nous chicanions plus
pour savoir qui d’entre nous est le plus grand.
Mais que le feu de ton Amour embrase le cœur
de tous ces hommes fragiles que nous sommes
pour que nous acceptions d’être instruments
de quelque chose de plus grand,
de beaucoup plus grand que nous-mêmes.
Que nous renoncions à construire « notre » Église
pour Te laisser Seigneur bâtir « ton Église » qui sera
vraiment humaine, vraiment divine, vraiment une.
Amen.

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