FMJ MtlJeudi, 5e Semaine de Carême – B
Frère Antoine-Emmanuel
Gn 17, 3-9 ; Ps 104 ; Jn 8, 51-59
29 mars 2012
Sanctuaire du Saint-Sacrement, Montréal

Deux sagesses

Le passage de l’Évangile de Jean
que nous avons lu hier et aujourd’hui
commence ainsi :
Jésus dit à ces juifs qui avaient cru en lui  (8,31).
Et il termine :
ils ramassèrent des pierres pour les lancer contre Jésus (8,59).

Jésus s’est adressé à des hommes qui croyaient en lui
et ceux-ci ont ramassé des pierres pour lapider Jésus.

Pourquoi cela ?

Parce que ces hommes très religieux
n’ont pas supporté d’être contestés par Jésus
dans leurs convictions religieuses.
Sa remise en question de leurs convictions religieuses
les a atteint si profondément qu’ils ont voulu lapider Jésus
en qui ils avaient cru pendant un temps.

De fait Jésus conteste une manière d’être :
celle d’un homme ou d’une femme
qui est très religieux mais pas filial ;
il conteste une manière subtile d’avoir Dieu pour soi,
de vouloir s’approprier Dieu
par des pratiques et des connaissances religieuses ;
une manière, somme toute,
de prendre le fruit de l’arbre défendu.

Dans un récent ouvrage sur la liturgie,
le père Jean-Louis Souletie écrit :
« Jésus expérimente
de la façon la plus parfaite possible pour un homme
la différence entre lui et Dieu.
Jésus éprouve en lui-même
la façon la plus parfaite possible pour un homme
d’être différent de Dieu,
car il est vrai Dieu et vrai homme. » (p. 16) (1)

C’est ainsi qu’il y a de la part de ces hommes religieux
une grande incompréhension vis-à-vis de Jésus.
« Pourquoi ne comprenez-vous pas mon langage ? »
leur dit Jésus (Jn 8,43).

Pour ces hommes très religieux, le nec plus ultra,
c’est d’être juste devant Dieu.
Pour Jésus, rien n’a plus de valeur
que d’être pauvre devant le Père,
de dépendre du Père,
de se recevoir du Père.

De cela Abraham a fait l’expérience
lui dont la pauvreté, l’attente,
l’ouverture au don de Dieu
ont été creusées et éprouvées très profondément.
Et dans cette pauvreté, il a reçu le Fils de la Promesse.
En cela il a vu le jour de Jésus
et en a été transporté de joie (cf. Jn 8,56).

*

Et nous, frères et sœurs, où nous situons-nous ?
Notre objectif est-il d’être justes devant Dieu, face à Dieu,
ou bien d’être dépendants de Dieu,
dans une dépendance filiale et joyeuse ?

La plus belle confession que nous pouvons faire demain
Lors de la liturgie pénitentielle
Ne sera-t-elle pas :
« Pardon Seigneur parce que j’ai voulu être Dieu
par mes propres forces » ?

© FMJ – Tous droits réservés.

1 Jean-Louis Souletie, Les moines et leur liturgie. 192 pages, Lethielleux / DDB 2011