FMJ Mtl2e DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE – B
Frère Antoine-Emmanuel
1 S 3, 3-10.19 ; Ps 39 ; 1 Co 6, 13-15.17-20 ; Jn 1, 35-42
18 janvier 2015
Sanctuaire du Saint Sacrement, Montréal

Éli et Samuel, Jean et André

La liturgie de la Parole de ce dimanche
nous offre quatre scènes à contempler,
quatre rencontres, quatre passages de témoins ;
Éli et Samuel, Jean-Baptiste et André,
André et Simon, Paul et Stéphanas.
Relisons-les l’une après l’autre.

Éli n’est pas un saint.
C’est un prêtre influençable, mou,
privé de détermination intérieure,
mais lorsque pour la troisième fois le jeune Samuel
vient à lui comme si Éli l’avait appelé,
Éli comprend qu’il s’agit de Dieu.
Il aide Samuel à entrer dans l’expérience de Dieu.
Car Samuel vivait auprès du temple,
mais il ne connaissait pas encore le Seigneur.
La Parole du Seigneur ne s’était pas encore révélée à lui (1 S 3,7).
Le vieil Éli aide ce jeune à entrer en relation avec Dieu,
à entrer en amitié avec Dieu,
à entendre sa Parole.
Quelle bénédiction Éli a été pour Samuel !

Est-ce qu’il y a eu des « Éli » dans votre vie
qui vous ont ouvert à la rencontre de Dieu ?

*

La deuxième scène est celle de l’Évangile :
Jean et ses deux disciples.
Que fait Jean ?
Il désigne Jésus.
Jean ne cherche pas à convaincre André et son compagnon.
Il montre Jésus : « Voici l’Agneau de Dieu » (Jn 1,36).
La parole de Jean et la vie de Jean indiquent un autre,
renvoient à un autre, humblement mais très clairement.

L’attente qu’André portait en lui trouve, grâce à Jean,
une réponse qui est un visage,
celui de Jésus, Maître et Seigneur.

Jean a été une bénédiction extraordinaire pour André :
en peu de mots, mais avec la vérité d’une vie qui s’efface
pour que paraisse Jésus.

Est-ce qu’il y a eu des Jean-Baptiste dans votre histoire
qui vous ont montré Jésus et ont su se retirer ?

*

La troisième scène est la suite de ce même Évangile.
André est allé avec Jésus.
Il a vu et il est resté auprès de Lui.
Et comme spontanément,
il s’en va trouver son frère Simon et lui dit :
« Nous avons trouvé le messie » (Jn 1,41)
et il amène Simon à Jésus,
simplement, par sa joie, par son enthousiasme.

Quelle bénédiction là aussi, André a été pour Simon !
Simon a été amené à Jésus
et a fait immédiatement l’expérience du regard de Jésus.
Et jamais Simon n’avait été regardé comme cela ;
regardé et transformé par Jésus.
« Désormais tu seras Pierre » (cf. v. 42).
Avec Moi, ta vie devient solide.

Est-ce qu’il y a eu des André sur votre route
qui vous ont amené à Jésus ?

*

La quatrième scène, c’est la deuxième lecture de ce dimanche.
Paul qui écrit aux Corinthiens.
Paul qui écrit à des hommes et à des femmes
qui ont déjà reçu l’Évangile,
qui ont fait l’expérience de Jésus.
Des femmes, des hommes comme Stéphanas par exemple,
un chrétien bien connu à Corinthe
que Paul lui-même a baptisé.
Que leur dit Paul ?
Paul les questionne : « Ne le savez-vous pas… ? » (1 Co 6, 15)

Est-ce que vous savez que votre corps est pour le Seigneur
et le Seigneur pour votre corps (v. 13) ?
Est-ce que vous savez que vos corps
sont les membres du Christ (v. 15) ?
Est-ce que vous savez que votre corps
est le temple de l’Esprit Saint (v. 19) ?
Est-ce que vous savez
que Dieu nous ressuscitera pas sa puissance ?

Paul aide Stéphanas à prendre conscience
des merveilles de la foi, des merveilles de son baptême,
des merveilles du don de Dieu.
Ta vie et ton corps lui-même
ont infiniment plus de dignité que tu ne le penses !
Quelle bénédiction pour Stéphanas !
Quelqu’un lui révèle
toute une profondeur de la foi qu’il ignorait.

Y a-t-il eu des « Paul » dans votre vie
qui vous ont révélé
votre dignité extraordinaire d’enfants de Dieu ?

*

Éli, un pauvre homme, mais un instrument de Dieu.
Jean-Baptiste, un grand ami de Dieu qui sait s’effacer.
André, un jeune témoin de Jésus par son enthousiasme.
Paul, un terroriste converti
qui est devenu le serviteur du Mystère du Christ.

Grâce à eux, Samuel est entré dans l’expérience de Dieu.
André a fait la rencontre de Jésus.
Pierre a été transformé par Jésus.
Stéphanas a découvert les merveilles de son baptême.

On nous parle beaucoup d’hommes aujourd’hui,
mais le Nouveau Testament est rempli de femmes
qui ont été témoins et même les premiers témoins du Christ.
Il suffit de penser à la femme de Samarie ou à Marie-Madeleine !

Frères et sœurs, est-ce que Dieu aime ces passages de la grâce
où un homme ou une femme est l’instrument
pour un autre de la rencontre de Dieu ?
Oui… Oh oui…
Le Seigneur aime que la vérité de son amour
circule entre nous les humains,
que nous nous enfantions les uns les autres
à la vie de Dieu, à l’amitié avec Dieu !
Quelle magnifique charité que d’accompagner
un homme ou une femme dans la rencontre de Dieu !
N’est-ce pas ?

Et ce n’est pas réservé aux saints :
Éli ne l’était pas, la femme de Samarie ne l’était pas.
Ce n’est pas réservé aux anciens.
Le jeune ouvrier de la pêche, André, ne l’était pas.
Ce n’est pas réservé aux prêtres.
Jean-Baptiste ne l’était pas.
Combien Dieu aime ce tissage de la grâce
où l’un de nous conduit un autre à Dieu.

Cela porte un nom… cela s’appelle l’Église.
L’Église c’est Éli qui conduit Samuel à Dieu ;
Jean qui montre Jésus à André ;
André qui témoigne auprès de Pierre ;
Paul qui révèle le mystère aux chrétiens de Corinthe ;
La Samaritaine qui porte l’Évangile dans sa ville
et Madeleine qui témoigne auprès des apôtres.

L’Église, c’est aussi Samuel qui se laisse enseigner ;
André qui écoute Jean ;
Pierre qui se laisse bousculer
et ainsi de suite.

L’unité de l’Église pour laquelle
nous prions spécialement cette semaine,
ce n’est pas que tous pensent de la même façon.
Ce n’est pas que tous deviennent catholiques de rite latin.
Cela ce n’est pas l’unité de l’Église,
mais le ratatissement de l’Église
dont le Seigneur a la bonté de nous préserver.

L’unité, c’est cette circulation de la vie divine
où moi, catholique de rite latin,
je voudrais me laisser enseigner
par Bassan, mon ami syriaque orthodoxe.
L’unité, c’est le Pape François
qui demande à des chrétiens évangéliques de le bénir.
L’unité, c’est nos frères maronites
qui nous ont demandé de venir les aider à prier pendant l’Avent.
L’unité, c’est nous tous qui, cette semaine,
demandons à un pasteur maronite,
un pasteur évangélique,
un pasteur presbytérien
et un prêtre orthodoxe, de nous aider à cheminer vers Dieu.

L’autre, celui qui est différent,
est celui par qui je peux découvrir davantage la vraie vie en Dieu.

Le but ce n’est pas d’être semblables,
c’est de nous laisser tisser dans ces liens d’amour,
de nous laisser prendre dans le filet de l’Amour de Dieu.

Il s’agit d’une unité vivante, organique
où nous ne sommes plus dominés par la peur de l’autre.
Au lieu de tuer Abel, nous allons l’écouter
et par Abel, nous allons découvrir une vie en Dieu,
une amitié avec Dieu que nous ne connaissions pas.

Frères et sœurs, cette unité vivante et organique,
elle a aujourd’hui un caractère d’urgence.
Aujourd’hui s’affrontent, je le répète, deux violences extrêmes.
La violence de ceux qui ont peur de perdre Dieu
et deviennent terroristes.
Et cela va jusqu’à des violences innommables
où Dieu est défiguré à l’extrême.
Et la violence des tenants du « nouvel ordre moral » occidental
où l’homme prend la place de Dieu
comme mesure de toutes choses.
Et cela va jusqu’à ridiculiser le pardon.
Deux violences qui s’affrontent et se vengent aveuglément.

La seule issue est dans le Christ,
qui prend sur Lui l’une et l’autre violence
qui accueille avec tendresse l’un et l’autre fils
qui tous deux ignorent le visage du Père.
La seule issue, c’est la Croix glorieuse de Jésus.
La seule issue est l’Agneau de Dieu
qui enlève le péché du monde.

Un jour des multitudes s’agenouilleront devant l’Agneau.
Tous aspireront à vivre de l’humilité du Christ.
Tous prendront les vrais chrétiens par la manche
et leur demanderont :
conduis-nous vers la douceur et l’humilité du Christ.

Mais la condition pour cela,
c’est que nous vivions de cette douceur et de cette humilité.

Ce sont nos querelles, nos arrogances, nos rivalités
qui font obstacle au salut du monde.
La prière pour l’unité commence par l’unité ici…
dans nos cœurs, dans nos communautés, dans notre diocèse.

Seigneur, donne-nous l’humilité de Samuel,
d’André, de Simon, de Stéphanas
que nous sachions Te recevoir à travers l’autre,
à travers celui ou celle qui est assis près de nous ce matin.

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