Sainte Marguerite Bourgeoys – A
(Mercredi, 1ère Semaine du Temps ordinaire)
Frère Antoine-Emmanuel
Si 2, 1-11 ; Ps 111 ; Jn 15, 9-17
12 janvier 2011
Sanctuaire du Saint-Sacrement, Montréal
L’Amour qui donne et qui reçoit
« Ce n’est pas vous qui m’avez élu,
mais c’est moi qui vous ai élus » (Jn 15,16).
Oui, nous sommes des élus,
des choisis,
des grâciés.
Le Seigneur a fait sourdre en nos vies
la source de la foi qui nous maintient
dans le désir de vivre avec Lui et pour Lui.
Qu’Il en soit béni !
Je vous ai élus nous dit Jésus,
Je vous ai « établis » dans un but bien précis :
pour que vous alliez et portiez du fruit
et que votre fruit demeure (id.).
Il y a là deux réalités :
partir, se mettre en route, prendre la route,
et porter du fruit.
Nous sommes des missionnaires, des envoyés ;
pour certains d’entre nous cela a signifié :
Quitte ton pays et va vers une autre terre
au nom de Jésus.
Mais pour ceux qui n’ont pas reçu cet appel,
c’est votre propre terre, votre propre milieu
qui est devenu votre lieu de mission.
D’une manière ou d’une autre,
la ville est désormais notre lieu de mission.
Comme Marie en route vers Aïn Karim,
nous avons épousé une vie « voyagère »
pour aller vivre un échange de grâce,
une expérience de communion.
Car le Seigneur nous a envoyés
pour porter un fruit qui demeure…
Le fruit qui demeure,
le fruit qui ne passe pas,
qui ne pourrit pas,
qui ne meurt pas :
c’est la Vie de Dieu.
C’est la circulation d’Amour qui est en Dieu,
qui est Dieu.
Aller porter ce fruit c’est aller donner sa vie à d’autres,
oui, mais aussi aller recevoir la vie que eux nous donnent.
C’est aller porter la contagion de cet échange d’amour.
N’est-ce pas cela que vit Marie à Aïn Karim ?
Marie offre à Élisabeth et à Jean
la Vie nouvelle dont elle est le Tabernacle,
la Vie du Fils, la Vie de Jésus.
Et Marie reçoit d’Élisabeth
le cadeau de l’œuvre divine extraordinaire
qui se déploie en elle.
L’échange entre les deux femmes est inouï.
Chacune reçoit, chacune donne,
chacune s’émerveille.
Aller porter du fruit,
ce n’est pas aller livrer un contenu,
fut-il notre vie,
et s’en aller sans rien accueillir.
Non !
C’est aller donner et recevoir,
c’est aller provoquer à l’amour certes
en prenant l’initiative de l’amour,
mais en accueillant le don de l’autre.
C’est cela le « fruit qui demeure »
parce que c’est la Vie de Dieu.
Un vrai catéchiste transmet la foi de l’Église aux enfants,
mais aussi s’émerveille de ce que portent les enfants
et accueille cette richesse en soi.
Un laïc envoyé dans le monde
porte dans la réalité de la ville,
du travail, de la politique,
la bonne nouvelle de l’Évangile
– surtout par sa vie –
mais il accueille aussi le don
qui lui vient des collègues, des amis, des voisins.
Un prêtre se donne pour guider,
enseigner, sanctifier, le peuple de Dieu,
mais il reçoit le don d’humanité et de sainteté
que Dieu dépose dans chacun de ses enfants.
Un moine, une moniale, de Jérusalem
est envoyé dans une ville
pour y être missionnaire de la prière,
il éveille, elle éveille chez les autres le sens de Dieu,
le goût de Dieu,
il appelle au primat de Dieu,
il se donne pour devenir signe de l’attente de Dieu,
mais il reçoit des citoyens une immense richesse de sainteté.
Il ne s’agit pas d’être intéressé,
il ne s’agit pas de calculer pour recevoir ce qui nous plaît
– comme Paul qui nous dit aujourd’hui
n’avoir jamais cherché d’honneurs (1 Th 2,6) –
il s’agit d’avoir le cœur ouvert à l’autre,
comme Jésus.
Comme Jésus émerveillé par la foi du centurion (cf. Lc 7,9),
accueillant la tendresse de la femme pécheresse (cf. Lc 7, 36-50)
ou proclamant la foi de la femme syro-phénicienne (cf. Mt 15,28).
Ou bien comme Paul qui dit aux Philippiens
qu’ils sont sa joie et sa couronne (Ph 4,1).
N’est-ce pas cela
avoir de l’amour les uns pour les autres ? (cf. Jn15,17)
Donner, se donner et accueillir le don des autres…
*
Seigneur, aujourd’hui,
à la prière de Sainte Marguerite Bourgeoys,
renouvelle en nous le don de ton Esprit Saint
pour que nous vivions de cet échange d’amour,
pour que nous en soyons contagieux.
© FMJ – Tous droits réservés.