FMJ Mtl14e DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE – C
Frère Antoine-Emmanuel
Is 66, 10-14 ; Ps 65 ; Ga 6, 14-18 ; Lc 10, 1-12.17-20
3 juillet 2016
Sanctuaire du Saint-Sacrement, Montréal

D’où te vient cette joie ?

« Joie, joie, pleurs de joie » (Blaise Pascal, mémorial).
Avez-vous entendu cette promesse du Seigneur
dans la Première Lecture ?
« Votre cœur se réjouira » (Is 66,14).
Et Isaïe continue :
« vos membres comme l’herbe nouvelle seront rajeunis » (id.).
Promesse de joie du cœur.
Promesse de printemps pour le corps lui-même.
Voilà, frères et sœurs,
l’avenir que le Seigneur nous prépare.
Dieu n’est pas avare de son bonheur ;
son désir est de nous le partager éternellement.

Et si nous nous inquiétons du regard que Dieu nous porte,
nous qui sommes si fragiles et inconstants, écoutez :
« Vous serez comme des nourrissons que l’on porte sur son bras,
que l’on caresse sur ses genoux.
De même qu’une mère console son enfant,
moi-même Je vous consolerai » (Is 66, 12-13).
N’est-ce pas cela le secret de la joie ?
Laisser Dieu nous prendre dans ses bras ;
laisser Dieu nous caresser et nous consoler.

Et où pourrons-nous vivre cela ?
Où goûterons-nous cette tendresse ?
« Dans Jérusalem vous serez consolés » (v. 10).
En cette Jérusalem qui reçoit de Dieu
la paix comme un fleuve,
et vers laquelle conflue la gloire des nations
comme un torrent qui déborde (v. 12).

Il s’agit de la Jérusalem céleste,
lieu du rassemblement éternel qui nous attend tous,
lieu de cet être-ensemble dans l’éternelle joie de Dieu.

Dieu ne nous consolera pas seuls
comme des individus gâtés, isolément :
Il nous caressera et nous consolera ensemble
et les uns à travers les autres.
Le bonheur véritable, le bonheur éternel
est un bonheur de communion,
un continuel échange de grâces
sans cesse reçues, sans cesse données,
sans cesse partagées.
Le bonheur est de tout recevoir
et de tout donner.
« Heureux les pauvres de cœur,
le Royaume est à eux » (Mt 5,3).
Le Royaume est à eux,
et sans cesse ils le donnent aux autres.
Recevoir Dieu et donner Dieu.
Dieu aime être le don que nous nous faisons les uns aux autres.
Dieu aime nous déposséder les uns au profit des autres.
Dieu aime nous embarquer dans Sa continuelle dépossession.

Nous sommes trop riches, frères et sœurs.
Trop riches de nous-mêmes,
trop riches, trop encombrés de ce qui n’est que de ce monde.
Puissions-nous en arriver
à l’expérience de l’apôtre Paul :
« le monde est à jamais crucifié pour moi
et moi pour le monde » (Gal 6,14).
Le monde est mort pour moi.
Le monde avec tout ce qui y brille ne me séduit plus.
Et moi je n’appartiens plus au monde.
Je n’entre plus dans son commerce,
dans son jeu, dans ses fantasmes.
Et Paul de partager son secret, son bonheur :
« que la croix de notre Seigneur Jésus Christ
reste mon seul orgueil » (id.).

Le secret du bonheur est là :
ne pas avoir d’autre trésor que la Croix de Jésus;
ne pas avoir d’autre trésor que Jésus ressuscité.
Tous les autres trésors nous asservissent,
et nous, nous sommes faits pour la liberté,
la liberté de l’Amour.

Jésus, Lui, nous entraîne dans la danse,
cette danse de tout recevoir et de tout donner.

C’est cela qu’ont goûté les 72 ;
saint Luc nous dit qu’ils revinrent tout joyeux.
Sont-ils joyeux parce qu’ils reviennent
les poches pleines d’or et d’argent ?
Non !
Leur joie est d’avoir donné Dieu !
Ils sont heureux parce que par eux, Dieu s’est donné.
Leur joie est d’avoir été un chemin
parlequel Dieu est passé pour rejoindre et libérer,
pour caresser et consoler
des âmes souffrantes, des vies épuisées.

Et qu’est-ce qui a permis ce déferlement de grâces ?
Leur pauvreté : pas d’argent, pas de sac,
pas de sandales (de rechange)…
Comment ne pas penser à la réponse de Pierre et Jean
à l’infirme de la Belle-Porte :
« De l’or ou de l’argent, je n’en ai pas ;
mais ce que j’ai, je te le donne.
Au nom de Jésus-Christ le Nazaréen, marche ! » (Ac 3,6)

N’est-ce pas cela la grâce de l’église d’aujourd’hui ?
Que nous soyons démunis de pouvoir et de richesse,
et par conséquent, disponibles
pour laisser passer l’Amour de Dieu.

Et nous-mêmes, en cette fin d’année pastorale,
nous pouvons aussi nous écrier :
joie, joie, joie !
Joie d’avoir pu chanter ensemble
la louange de Dieu en pleine ville de Montréal ;
joie d’avoir pu porter notre ville et notre monde
dans notre prière d’adoration ;
joie d’avoir pu puiser ensemble dans le Trésor de la Parole
pour que notre vie convertie dise Dieu au monde;
joie d’avoir grandi dans la miséricorde et l’entraide ;
joie d’être sortie sur l’avenue
pour désaltérer les âmes desséchées;
joie d’avoir accueilli des chercheurs de Dieu
qui ont franchi les portes du Sanctuaire.

Joie… oui !
… mais ne vous réjouissez pas de tout cela :
réjouissez-vous parce que vos noms
sont inscrits dans les cieux ! (Lc 10,20)
Jetez l’ancre de votre joie
là où rien ni personne ne peut vous la voler.

Jetez l’ancre de votre joie dans le cœur du Christ
et dans le salut qu’il nous offre.
Vos noms sont inscrits dans les cieux.
Ils ne sont pas inscrits sur la poussière du sol
ou même dans un livre… mais dans les Cieux.
Nous sommes inscrits ensemble dans le Ciel de Dieu,
gravés ensemble dans son cœur.

C’est cela que nous proclamons quand nous chantons :
« Viens, que vienne ta grâce,
que ce monde passe,
et Tu seras tout en tous ».

Nous vivons pleinement dans ce monde,
mais nous ne lui appartenons pas.
Nous appartenons à Celui qui Se donne à nous,
à Celui qui aujourd’hui encore
Se donne dans son corps et dans son sang,
dans son âme et sa divinité.

*

Claire (6 ans), aujourd’hui tu vas recevoir Jésus-Eucharistie
pour la première fois.
Tu es sa princesse !
Tu es sa joie et toi, tu dis « oui » à Jésus…
Tu t’y es préparée auprès de sr. Lucie-Caroline
et tout à l’heure, tu vas dire « amen »,
c’est-à-dire : oui, j’y crois de tout mon cœur.
Oui, avec toi et comme pour toi,
le Ciel, la joie de Jésus est déjà dans notre cœur,
et cette joie, toi et nous tous ensemble
nous voulons la partager,
nous voulons la donner à tous autour de nous.

Avec toi, Claire, nous allons tous vivre cette messe
comme si c’était aussi pour nous
notre première communion.
Nous allons recevoir la « communion » !

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