FMJ MtlNOTRE-DAME-DU-SAINT-SACREMENT
(Vendredi, 3e Semaine de Pâques – A)
Frère Antoine-Emmanuel
Éz 47, 1-12 ; Ct Is 12 ; Jn 2, 1-11
13 mai 2011
Sanctuaire du Saint-Sacrement, Montréal

Le Printemps du Christ

Quelle joie de regarder le printemps !
Cette explosion de vie,
les bourgeons qui éclatent
et laisse passer des pousses pleines d’espérance.
Les fleurs qui brisent l’épaisseur de la terre
pour aller chercher le jour.
Les couleurs qui se déploient,
les boisés qui se parent de tapis de fleurs…

La vie était là, cachée, patiente, frémissante,
et maintenant elle paraît au grand jour
avec une liberté extraordinaire.
Il y a les fleurs qu’on attendait
et celles qu’on n’attendait pas
ou celles qu’on n’attendait plus !

*

Ce printemps des fleurs, des plantes, des arbres
nous dit quelque chose de ce qui se passe depuis Pâques.
La vie – la Vie – en attente depuis si longtemps
a finalement frayé un chemin
jusque dans notre humanité.

La Vie s’est faite chair,
elle a habité parmi nous (cf. Jn 1,14 et 1,4)
et elle est descendue jusque dans les profondeurs de la mort
pour envahir, pour vivifier tout,
tout ce qui fait notre humanité.

Le Ressuscité est au printemps des humains
ce que l’amandier est au printemps des arbres.
Il est le Premier-né d’entre les morts (Col 1,18).
Le bourgeon qu’est notre nature humaine s’est laissé ouvrir
et la vie éternelle est apparue au grand jour !
Jésus ressuscité est notre Printemps.
Mais il y a une différence entre les arbres de notre terre
et nous autres les humains.
Tous les arbres – pour peu qu’ils soient vivants –
se laissent envahir par le nouveau printemps.
Mais nous… combien sont-ils les humains,
combien sont-ils les chrétiens
qui se laissent bousculer par cette poussée de Vie
qui est l’irruption du Ressuscité dans notre quotidien ?

Le Soleil du printemps est là,
mais beaucoup, beaucoup d’humains sont encore en hiver…
Et en nous-mêmes,
il y a encore beaucoup de vallées ou de montagnes,
d’abîmes ou de pics qui sont encore en hiver.

Nous sommes faits pour le printemps de Pâques,
mais ce printemps ne peut fleurir
sans notre oui,
sans notre foi.

N’est-ce pas pour cela que Jésus,
à l’heure où Il prend sur Lui tout l’hiver des humains,
a voulu confier Jean,
a voulu nous confier
à une femme, à une mère ?

« Fils, voici ta Mère (Jn 19,27).
Ce n’est pas seulement : « voici ta professeure, voici ton coach,
voici ta compagne… »
C’est « Voici ta Mère ».
Et qui dit maternité, dit vie !

La maternité est un service à la vie
où la femme donne sa vie
pour porter et faire grandir une vie
qui vient d’un autre.

Pour que le printemps du Christ nous atteigne,
pour que cette Vie se déploie en nous et dans le monde,
nous avons besoin d’une mère.
Pour ne pas devenir une forêt de chicons rongés par les vers
et dévorés par les pics sous le soleil du printemps,
nous avons besoin d’une mère,
d’une femme qui vive déjà de cette Vie
et qui soit toute entière au service de cette Vie.
« C’est Marie qui conduit la route
de l’actuelle Jérusalem à la Jérusalem nouvelle »
dit avec audace notre Livre de vie au n° 177.

C’est Marie qui nous entraîne
dans le printemps du Christ
où tout en nous se transforme.

On ne vit plus de la même manière
les relations, la prière, le travail,
quand Marie nous enfante à la vraie Vie
qu’elle, la première, a reçu en elle.

Lorsque nous ne voyons pas
ou ne voyons plus Jésus,
lorsque, comme les serviteurs de Cana,
nous n’avons pas idée que Jésus peut transformer notre vie,
Marie est là.
Elle nous conduit à Jésus ressuscité
et elle nous dit : « Tout ce qu’il vous dira, faites-le » (Jn 2,5)
puis elle se retire dans sa joyeuse discrétion.

*

Nous avons au plus profond de nous
un immense désir de bonheur.
Nous pouvons le nier, le taire, le refuser, il est là
et notre âme nous en témoigne peut-être en ce moment même.

Nous avons la nostalgie de la fête,
c’est-à-dire d’un bonheur partagé,
d’un bonheur-avec,
d’un bonheur de noces…
C’est inscrit en nous !

Mais nous sommes frustrés
parce que la souffrance, le mal, la mort, le péché
semblent barrer sans cesse
le chemin de la fête à tous les humains.

Mais dans cette frustration,
Marie se fait proche et nous redit :
« Quoique Jésus te dise, fais-le ! »
Le bonheur ne sera pas ton industrie,
le bonheur est dans ce printemps du Christ
qui de l’intérieur transfigure le monde
et le mène dans la fête
où la pauvreté de l’homme danse avec la pauvreté de Dieu.
Les prostituées et les publicains sont en tête du cortège,
avec les Zachée et les bons larrons.

La victoire de Pâques a ouvert la fête,
et l’Eucharistie vers laquelle Marie nous conduit,
est déjà cette fête ici-bas.
L’Eucharistie c’est le printemps déjà accompli
dans un peu de pain et un peu de vin
pour que la fête entre en nous,
et par nous dans le monde entier.
Amen. Alléluia !

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