FMJ MtlLA SAINTE TRINITÉ – B
Frère Thomas
Dt 4,32-34.39-40 ; Ps 32 ; Rm 8, 14-17 ; Mt 28, 16-20
31 mai 2015
Sanctuaire du Saint-Sacrement, Montréal

Au Nom du Père, du Fils et du Saint Esprit

Quelle image avons-nous de Dieu ?
Quand nous disons Dieu,
à quoi, à qui pensons-nous,
que voyons-nous ?

Il y a certainement, à un moment ou à un autre,
l’image d’un monsieur d’un âge mûr ou avancé
avec une barbe noire ou blanche, grand et imposant,
trônant dans le Ciel, qui nous vient.
Ce sont là des images que nous avons certainement vues
représentées ici ou là,
mais qui ne sont que des projections des grands de cette terre.

Voilà que dans la tradition chrétienne,
Dieu est appelé Trinité.
Curieux nom pour Dieu !
C’est un nom qui ne se trouve pas dans la Bible,
ni dans l’Ancien et ni dans le Nouveau Testament.
C’est la Tradition chrétienne,
au fil des conciles, au 4e siècle notamment,
qui a mis en place ce nom, pour rendre compte
qu’il y a un seul Dieu en trois personnes.

Pourquoi donc une formulation aussi compliquée
pourrions-nous penser ?
Que d’incompréhensions
autour de telles formulations dans les siècles !
Que de querelles, que de divisions,
que de violences, que d’emprisonnements
et de mises à mort même, autour de ces mots.

Jésus est-Il ou non Fils de Dieu ?
Est-Il Homme et Dieu, de façon séparée ou mélangée ?
L’Esprit-Saint vient-Il seulement du Père,
ou vient-Il du Père et du Fils ?
Toutes ces questions sont de bonnes questions,
qui méritent réflexion.
Mais quand les diverses positions
deviennent des idéologies,
c’est la porte ouverte à l’affrontement,
aux hostilités ou à la guerre.

Beaucoup de nos contemporains
associent ainsi les religions à la guerre.
Alors faut-il renoncer à réfléchir sur Dieu
parce que cela risque de produire des idées
qui divisent les humains et qui produisent la guerre ?

L’Histoire de notre monde et l’actualité
nous montrent hélas que même sans les religions,
les humains sont experts à créer des idéologies
et par là, même des affrontements.
Prenons par exemple
les diverses façons de voir l’économie et la vie sociale,
qui engendrent bien des affrontements.
Mais lorsque des personnes protestent contre les religions
qui engendrent de la guerre,
il y a là un appel en creux pour nous
à vivre notre religion vraiment comme une religion :
c’est-à-dire comme quelque chose
qui relie les humains avec eux-mêmes et entre eux.

Ainsi, je vous propose de poser d’abord
un regard sur la Sainte Trinité avec les yeux de notre cœur.

Hier après-midi, je faisais visiter l’église à une femme musulmane
qui était très intéressée par les mystères de la foi chrétienne
qu’elle découvrait à travers les vitraux et les fresques.
Tout en relevant les différences
entre la foi musulmane et la foi chrétienne,
elle voyait que nos deux traditions religieuses
avaient la même source.
Aussi, elle a fait preuve d’une grande ouverture
lorsque je lui ai parlé
du Mystère de Jésus Fils de Dieu mort et ressuscité
et du mystère de la Sainte Trinité
d’un seul Dieu en trois personnes.

Regardons ce mystère à partir des textes bibliques de ce jour.
Le livre du Deutéronome parle de Dieu
à partir de ce qu’Il a fait pour son peuple Israël.
C’est un Dieu qui a parlé et qui a conduit son peuple
pour en prendre soin.

Voilà quelque chose de nouveau :
Il ne s’agit pas d’un Dieu
qui serait la projection de nos roitelets humains.
Il ne s’agit pas non plus d’un Dieu impersonnel,
principe philosophique de toutes choses.
Il s’agit d’un Dieu qui Se plaît
à entrer en relations avec les humains.
C’est ainsi qu’Il se définit.
À Moïse, Il se présente comme
le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob (Ex 3,6),
ou comme le Dieu de tendresse et de pitié,
riche en grâces, lent à la colère et plein d’amour (Ex 34,6).

Saint Paul, dans sa lettre aux Romains,
nous parle de l’Esprit de Dieu
qui fait de nous des fils et des filles de Dieu,
enfants du Père, héritiers de Dieu avec le Christ.
Voilà de nouveau Dieu qui nous est présenté
dans les relations qu’Il a avec nous.

Mais il y a plus : il s’agit ici des relations
que nous pouvons décider de notre côté de vivre avec Lui.
Il y a Jésus-Christ, le Fils de Dieu.
Il y a l’Esprit de Dieu qui nous est donné
pour que nous vivions à notre tour – si nous le voulons,
si nous le décidons – en enfants de Dieu.
Et cela va loin, puisque par l’Esprit de Dieu
nous appelons Dieu « Abba », c’est-à-dire « Papa » !
Comme on est loin ici de l’image de Dieu
comme personnage imposant et vénérable
qui trône dans les cieux.
Certes l’Écriture Sainte parle souvent de la gloire de Dieu,
de Celui qui est plus haut que tous les cieux ;
mais elle ne cesse aussi de parler de Lui
comme Celui qui S’abaisse pour voir cieux et terre,
qui relève le faible de la poussière
et qui retire le pauvre du fumier.

Dieu n’est pas là pour nous impressionner
mais pour nous faire vivre.
Et si Dieu est dans la gloire,
Il veut nous faire partager sa gloire.

Dans l’Évangile de ce jour,
qui relate la dernière apparition
de Jésus ressuscité à ses disciples
juste avant son Ascension,
Jésus envoie ses apôtres pour baptiser
au nom du Père, et du Fils et du Saint Esprit (Mt 28, 19).

Voilà donc que Jésus met ces trois Personnes divines
sur le même pied d’égalité.
Et en plus Jésus place ces trois Personnes –
le Père, le Fils et le Saint Esprit –
au cœur de la vie de chaque chrétien,
puisque c’est en leur nom que nous sommes baptisés,
que nous sommes plongés.
Qu’est-ce à dire ?
Cela signifie que la Trinité n’est pas
un mystère incompréhensible et opaque
fait pour nous impressionner.
Elle est un mystère de relations d’amour, de vie partagée,
dans lequel nous sommes invités à entrer.

Ainsi donc, la Trinité, ce n’est pas une originalité des chrétiens
pour se démarquer des autres religions avec dédain et mépris.
Ce n’est pas non plus une construction intellectuelle
de quelques théologiens ou responsables d’Église,
pour dominer le peuple des fidèles qui leur est confié.

La Trinité, c’est l’être de Dieu,
qui est relation de personne à personne.
La Trinité, c’est notre programme à nous
qui voulons vivre de Dieu,
qui voulons vivre comme Dieu, avec Lui et entre nous,
dans des relations d’amour de personne à personne.

La Sainte Trinité, c’est ce que nous essayons de vivre
quand nous sortons sur le Parvis à la rencontre des passants
pour les rencontrer comme des personnes,
avec leurs beautés, avec leurs valeurs,
pour contempler en eux l’image de Dieu
Père, Fils et Saint Esprit.

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