FMJ MtlMercredi, 11e Semaine du Temps ordinaire – B
Frère Thomas
2 Co 9, 6-11 ; Ps 111 ; Mt 6, 1-6.16-18
17 juin 2015
Sanctuaire du Saint-Sacrement, Montréal

Donner, prier, jeûner … pour l’autre, pour Dieu

Une fois je rencontrais un groupe de jeunes
pour les aider à voir les valeurs
qu’ils portaient en eux
à partir d’engagements auprès des autres
qu’ils avaient vécu.
Certains d’entre eux demandaient
s’il était possible de poser des actes
en faveur d’autres personnes
de façon désintéressée.

C’est bien là la question qui sous-tend l’Évangile
que nous venons d’entendre :
si je fais l’aumône, si je prie, si je jeûne,
est-ce que je le fais pour les autres,
pour Dieu, ou bien pour moi,
pour obtenir la gloire qui vient des humains ?
C’est le plus souvent bien difficile
de faire la part des choses
quand nous posons de tels actes.

Mais Jésus nous donne l’enjeu
de notre motivation profonde :
voulons-nous toucher notre récompense
des humains, tout de suite,
ou voulons-nous toucher notre récompense
de Dieu de façon durable ?
Regardons d’abord
de quelle récompense il s’agit
dans chacun des cas de figure.

Si je fais l’aumône pour me donner en spectacle,
pour être bien vu des grands de ce monde,
ou pour me donner bonne conscience,
quelle est la valeur de mon aumône ?
Telle organisation, telle entreprise, tel État,
fait par exemple un don généreux
pour une œuvre humanitaire,
pour monter à ses partenaires
qu’il (elle) est charitable et de l’autre côté,
machine des affaires malhonnêtes
ou irrespectueuses des personnes.

Que doivent ressentir
les personnes bénéficiaires du don ?
Elles se sentent humiliées
par ce qu’utilisées dans une stratégie
que développe ce groupe
pour ses propres intérêts.

Si je donne pour augmenter mon prestige
auprès de tierces personnes,
les personnes à qui je donne ne comptent pas,
elles ne sont que des pions dans mes stratégies.
Cela Dieu l’a en horreur.

C’est bien cela aussi que saint Paul
rappelle aux Corinthiens
quand il les invite à donner pour la collecte
en faveur des chrétiens de Jérusalem.
« Chacun doit donner
comme il a décidé dans son cœur,
sans regret et sans contrainte
– nous pourrions ajouter sans calcul – ;
car Dieu aime celui qui donne joyeusement » (2 Co 9,7).

De la même manière avec la prière :
si je prie pour montrer que je suis quelqu’un de pieux
– pour faire bonne figure par exemple
auprès d’amis chrétiens pratiquants –
quelle est la valeur de ma prière ?
Dieu ne compte plus,
Il devient à son tour un pion dans mes stratégies.

Et si je jeûne pour montrer
que je suis quelqu’un qui se maîtrise
et que dès que je suis seul
– ou à l’abri des regards de ceux
auprès de qui je veux faire bonne figure –
je me remets à faire bonne chère
ou à me livrer à toutes sortes de plaisirs,
qu’est-ce que je fais des personnes
auprès desquelles je joue la comédie,
qu’est-ce que je fais de mon jeûne
et surtout qu’est-ce que je fais de moi-même ?

Certaines personnes – ou groupes de personnes –
jouent ainsi un double jeu
de manière consciente, bien calculés.
D’autres le font de manière inconsciente.
Nous pouvons tous et toutes reconnaître
que nous avons tendance
à utiliser les pratiques religieuses,
les actions de justice ou de charité
pour notre propre intérêt.
Ainsi Jésus ne nous accuse pas,
mais Il nous met en garde.
Jésus nous met en garde
parce que notre véritable intérêt,
dans toutes ces pratiques que nous faisons,
c’est précisément de ne pas chercher notre intérêt.

Et il ne s’agit pas non plus
de ne faire qu’attendre que le Père des Cieux
nous récompense au moment de notre mort,
quand nous Le verrons.
Si véritablement, je cherche le bien de mon prochain
en faisant l’aumône,
si je cherche à me rapprocher de Dieu en priant,
si je cherche à grandir dans l’amour véritable en jeûnant,
alors dès cette terre le Père me le revaudra.
Dès cette terre, je commencerai à voir
le bel amour des autres, de moi-même,
de Dieu qui est en moi.
Cela me rendra profondément heureux,
car cela a de l’avenir :
cela donne dès cette terre un goût d’éternité.
Alors que s’attacher aux intérêts immédiats déçoit,
parce que ce sont là des avantages qui ne durent pas.

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