FMJ MtlVendredi, 22e Semaine du Temps ordinaire – C
Frère Antoine-Emmanuel
Col 1, 15-20 ; Ps 99 ; Lc 5, 33-39
6 septembre 2013
Sanctuaire du Saint-Sacrement, Montréal

 

Pourquoi jeûner ?

Comme vous le savez probablement,
le pape François a invité tous les croyants,
à offrir demain samedi,
une journée de jeûne et de prière
pour la paix en Syrie tout particulièrement
et dans le monde.

Mais pourquoi nous demander de jeûner ?
Qu’est-ce que le jeûne ?

Jeûner cela signifie renoncer à manger
ce dont nous avons besoin.
Renoncer à manger des bonbons n’est pas un jeûne :
Cela, c’est de l’ordre de la justice, de la prudence, de la mesure !

Jeûner signifie donc ressentir physiquement la faim,
Et donc faire l’expérience
de ce que nous avons besoin de la nourriture.
Nous ne sommes pas des êtres auto-suffisants.

Dans un contexte religieux, chrétien ou non,
jeûner c’est reconnaître mon besoin de Dieu, de sa Providence.
Je reviens à la vérité : je suis une créature,
façonnée et maintenue en vie par un Créateur.

Le jeûne à d’autres aspects :
c’est une purification physique et psychologique,
pratiquée même dans des cercles non religieux.
Il signifie aussi le deuil, il exprime le repentir, la pénitence.
Il peut aussi être, par le partage, une ouverture à la solidarité.

Mais dans une perspective religieuse
Son but est essentiellement nous remettre
dans notre vérité de créatures ;
il accompagne ainsi un chemin de conversion.

Et souvent, il est joint à la prière de supplication
qui confesse aussi notre besoin de Dieu, de son Salut.

Notons que, toujours dans la perspective religieuse,
le jeûne devient parfois une prescription, une loi, des préceptes.
Mais avec un gros risque :
si j’en reste au niveau de la loi,
je détourne le jeûne de son objectif :
« si je jeûne, je suis en règle avec Dieu »,
je n’ai plus besoin… de Dieu !

*

Dans l’Évangile d’aujourd’hui,
nous sommes dans une salle à manger
autour de la table d’un grand banquet.
Il y a Jésus, Levi, ses amis publicains et pécheurs,
et les disciples.

Les pharisiens accusent Jésus :
tes disciples mangent et boivent
alors que nous et les disciples de Jean Baptiste
nous jeûnons et prions ! (cf. Lc 5,33)

Merci aux pharisiens… grâce à eux
nous avons une parole extraordinaire de Jésus sur le jeûne !

De fait, est-ce que le jeûne est chrétien ?

La réponse de Jésus est étonnante :
Les compagnons de la noce
– nous dirions aujourd’hui les témoins, les garçons d’honneur –
ne jeûnent évidemment pas quand l’époux, le mari, est là.
Ils font la fête !
Ils mangent et boivent… et pas du thé ou du jus !

Mais si l’époux s’en va,
alors ils en souffrent,
et ils expriment cette souffrance par un jeûne.

Jésus ne dit donc pas : « le jeûne c’est fini ! »
Il dit premièrement :
Vous êtes mes compagnons de fête, de noces
parce que Je suis venu épouser l’humanité.
La vie chrétienne c’est une fête.

Puis il ajoute :
Cette fête, elle passe par la Croix.
Elle jaillit de la croix
où l’Époux – Jésus – va être enlevé.

Cette fête, elle est aussi marquée par le désir, l’attente.
La plénitude des noces, de la fête, ce n’est pas ici-bas,
ce sera dans le Ciel, où l’Époux a été enlevé lors de son ascension.

Alors le jeûne chrétien ?
Il a ces deux aspects !

Le premier aspect du jeûne est de nous unir à la Passion de Jésus,
à son « enlèvement » dans la mort,…
en jeûnant, en choisissant de renoncer au souper de demain,
nous allons en souffrir un peu
et cette souffrance c’est un choix, une décision,
une réponse à l’appel de Jésus :
avec Jésus je m’offre au Père pour le salut du monde.

Et pour nous demain :
avec Jésus, je m’offre au Père
pour la paix en Syrie et dans le monde.
Je confesse que seule la Croix de Jésus,
sa Passion et sa mort,
donnent au monde la vraie Paix !

Humainement, cela semble tellement vain et inutile de jeûner !
Ce n’est pas parce que je vais jeûner que M. Poutine
va faire pression sur M. Assad ?
Eh bien… non !
dans la réalité – mystérieuse – de la communion des saints,
ce que toi tu vas offrir compte
énormément pour la paix dans le monde.

Puis vient le deuxième aspect.
Pour nous chrétiens, jeûner,
c’est nous remettre non seulement
dans notre vérité de créatures,
mais aussi dans la vérité
que notre but n’est pas la belle vie ici-bas.
Notre vraie destinée, c’est le Ciel…
et le « Ciel pour tous ».
Le jeûne nous garde dans l’attente,
le désir des noces éternelles.

Dans l’un comme dans l’Autre de ces deux aspects, vous le voyez,
le jeûne chrétien n’est pas séparable
de la personne de Jésus, de l’Époux.
Il n’est pas séparable de l’Eucharistie.

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