FMJ MtlMercredi, 5e Semaine de Carême – C
Frère Antoine-Emmanuel
Dn 3, 14-20.91-95 ; Ct Dn 3 ; Jn 8, 31-42
24 mars 2010
Sanctuaire du Saint-Sacrement, Montréal

Si le Fils te libère…

« Si vous demeurez dans ma parole,
vous êtes vraiment mes disciples,
et vous connaîtrez la vérité
et la vérité vous libérera » (Jn 8, 31-32).

Frères et sœurs, en entendant cette parole,
n’avons-nous pas envie de répondre
comme les juifs de l’Évangile :
nous ne sommes pas esclaves ! (cf. v. 33)
De qui, de quoi sommes-nous esclaves ?

Un esclave est quelqu’un qui appartient à un autre,
non par libre choix, mais par contrainte.

Est-ce que je suis esclave, moi ?

La réponse de Jésus est limpide, tranchante :
« tout homme qui commet le péché est esclave » (v. 34).

Nous avons tendance à regarder le péché
comme un acte de liberté.
Un acte certes répréhensible,
mais que nous avons pris la liberté d’accomplir.

Ou bien nous disons : j’ai mal usé de ma liberté.

En réalité tout péché, quel qu’il soit,
est l’acte d’un esclave privé de liberté.
Tu n’as pas mal usé de ta liberté : tu l’as piétinée !

Pour nous en convaincre,
il suffit de nous poser une question :
d’une confession à l’autre,
est-ce que je confesse des péchés bien différents ?
Non !
Le plus souvent, ce sont les mêmes péchés
que nous confessons.
Ce sont les mêmes péchés
qui nous tiennent en esclavage.

Nous ne sommes jamais libres
quand nous mentons,
quand nous envions,
quand nous murmurons,
quand nous manquons à la charité.
Nous ne sommes jamais libres
quand nous tournons le dos à Dieu.
Nous sommes esclaves du péché.

Revenons à la parole de Jésus :
Si vous demeurez dans ma parole,
vous êtes vraiment mes disciples,
et vous connaîtrez la vérité,
et la vérité vous libérera.

Il y a là une espérance extraordinaire.
Nous ne sommes pas condamnés à l’esclavage.
Nous ne sommes pas condamnés
à l’exil loin du Père, loin de l’amour,
comme l’esclave qui est incapable
de demeurer à jamais dans la maison (cf. v. 35).

Il y a pour nous une route qui conduit
de l’esclavage à la liberté,
de l’exil à la maison du Père,
des griffes du diable à la tendresse du Père.

Cette route passe par trois étapes.
La première est la découverte de la Parole de Jésus.
Je découvre une Parole qui est autre,
qui a une saveur nouvelle,
qui travaille en moi,
qui travaille entre nous
et qui nous transforme.

La deuxième étape, c’est de « demeurer »
dans cette Parole de Jésus.
De nous y plonger suffisamment souvent
pour qu’elle devienne notre culture :
pour qu’elle nous imprègne.
Pour qu’elle dépollue notre conscience
et nous donne peu à peu une nouvelle manière
de voir le monde,
de nous voir
et surtout de voir Dieu.

La troisième étape, c’est l’œuvre de cette Parole en nous ;
elle nous découvre la Vérité.
Elle nous dévoile la réalité
que jusqu’alors nous ne voyions pas,
ou nous ne voyions plus.
La vérité n’est pas ici un ensemble de concept,
mais c’est une relation avec la Création,
avec les autres et plus encore avec Dieu,
où il n’y a plus tous les écrans,
les barrages, les carapaces de la peur, de la culpabilité.
La vérité est une innocence recouvrée,
une simplicité du cœur,
un regard lavé et purifié.
En d’autres termes, c’est une participation
au cœur de Jésus,
au regard de Jésus,
qui nous mène en particulier
à « adorer » le Père « en vérité ».
Comme un enfant.
Comme le Fils.

Alors nous entrons dans la liberté,
parce que la Vérité nous rend libres.

Cette liberté, nous ne la connaissons encore que si peu.
Mais en contemplant la vie des saints,
en contemplant surtout la vie de Jésus,
nous la voyons resplendir.
La liberté c’est Jésus qui s’avance librement vers sa Passion.
Liberté incompréhensible pour les esclaves.
Liberté vraie de Celui qui choisit de pâtir et de mourir
pour prendre sur soi le péché des autres
et nous ouvrir le chemin vers le Père.

C’est la liberté de l’Amour
qui crucifie l’âme et le corps.
Nul n’a jamais été aussi libre
que Jésus lié de chaînes,
que Jésus cloué à la croix,
que Jésus jeté dans la mort des maudits.
Sa liberté, c’est sa parfaite communion de volonté avec le Père.
C’est son obéissance.
Son obéissance qu’il voudrait nous partager
en ces jours saints qui viennent.

Est-ce que tu vas accepter ce cadeau, ce don de grâce,
que Jésus te fait de son obéissance ?
Si le Fils te libère
tu seras vraiment libre (cf. 8,36).

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